Sibi Guissou a défendu, le mardi 17 décembre 2024, à l'Institut Supérieur des Sciences de la Population (ISSP) de l'Université Joseph Ki-Zerbo, sa thèse de doctorat unique en démographie, sous le thème : « Trajectoires professionnelles des sortants du système éducatif au Burkina Faso : enseignements de l'Observatoire de Population de Ouagadougou ». Le jury, après délibération, a déclaré l'impétrant digne du grade de docteur en démographie, avec la mention très honorable.
Selon Sibi Guissou, désormais Docteur en démographie, sa thèse traite de la problématique de l'employabilité des jeunes après l'arrêt de leurs études sous l'angle de l'enchaînement de leurs trajectoires de leurs séquences professionnelles.
« Contrairement à toutes les analyses antérieures qui ont peint en noir l'éducation, les résultats de cette thèse montrent que l'école a toujours de la valeur et du sens au Burkina Faso, même s'il y a encore quelques difficultés. Avoir plus de diplômes ou prolonger ses études, permet de suivre des trajectoires professionnelles stables d'emplois salariés et d'éviter d'être longuement au chômage ou en inactivité. C'est ce que montrent les résultats, contrairement aux autres études transversales, où on s'intéresse à un état professionnel donné sans savoir ce qui se passe après. Nous avons montré qu'en s'inscrivant dans la durée, en s'inscrivant dans la perspective longitudinale, on peut aller au-delà des assertions qui prétendent qu'il ne sert pas d'aller à l'école où que l'école fabrique des chômeurs. Nos recherches ont carrément montré le contraire. L'autre résultat majeur, c'est le désavantage des femmes sur le marché de l'emploi. Les femmes suivent des trajectoires chaotiques, erratiques et accidentées. Ce sont des trajectoires d'échec. Elles expérimentent tout le long des soixante premiers mois suivant l'arrêt des études des trajectoires de chômage, des trajectoires d'inactivité, des trajectoires qui sont loin des trajectoires masculines », a-t-il affirmé.
Des filières qui facilitent l'employabilité
L'impétrant a révélé, à travers les résultats de sa thèse, qu'il y a des filières qui facilitent l'employabilité. « On a remarqué que les enquêtés, qui ont fait des filières comme les sciences juridiques et les sciences économiques et de gestion, ont plus rapidement accès à l'emploi et suivent des trajectoires d'emplois salariés. Cela s'explique par le contexte national. Lorsqu'on regarde de près les offres d'emplois depuis les cinq dernières années au niveau de l'Agence Nationale pour la Promotion de l'Emploi (ANPE) recherchent des profils des assistants comptables, des gestionnaires, etc. Un autre résultat majeur sur la perspective longitudinale, en analysant le premier emploi, montre que l'enseignement technique comme on le pensait ne garantit pas l'accès à l'auto-emploi », a-t-il souligné.
Des recommandations
Sibi Guissou, après les analyses, recommande de : mettre en place une recherche qualitative constituée de plusieurs publics ; mettre en place un observatoire d'étudiants au niveau national avec une bonne représentation des filières d'études et prenant suffisamment en compte les sortants du milieu rural ; poursuivre les analyses par l'application des séquences multidimensionnelles.
Pour le Directeur de thèse, Jean-François Silas Kobiané, Professeur Titulaire à l'Université Joseph Ki-Zerbo, les résultats réhabilitent l'école.
« Je tiens à dire ma grande satisfaction pour le travail de l'impétrant. C'est le troisième démographe formé par l'Université Joseph Ki-Zerbo. Il a travaillé dans le cadre d'un projet de recherche, avec l'appui financier de l'Union Européenne, qui porte sur le parcours scolaire et le devenir des sortants du système éducatif. Au cours de ce projet, nous avons collecté des données originales à travers l'Observatoire de population de Ouagadougou, qui est une plateforme de recherche et d'intervention mise en place par l'Institut Supérieur des Sciences de la Population. Cette thèse est originale par la nature des données. Ce sont des données de cohorte, car on a suivi deux promotions d'élèves qui ont arrêté à la classe de troisième, de terminale, mais aussi ceux qui ont arrêté à l'université. Ils ont été suivis pendant cinq ans pour voir ce qu'ils sont devenus et quelles ont été leurs activités professionnelles chaque mois pendant cinq ans. C'est une thématique pertinente et d'actualité qui aborde la problématique de l'employabilité des sortants du système éducatif. On reproche à notre système éducatif de produire des chômeurs. À des données de natures transversales, réalisées par l'Institut National de la Statistique et de la Démographie, on a pu observer que les personnes les plus instruites étaient celles qui avaient plus de difficultés à s'insérer. Mais, avec des données originales de nature longitudinale, on se rend compte non seulement que ceux qui sont les plus instruits accèdent plus rapidement à des parcours d'emplois salariés, mais qu'ils ont aussi plus de chance de s'insérer professionnellement. Cette thèse vient donc réhabiliter l'école », a-t-il indiqué.
La composition du jury
Le jury était composé de : Bowendsom Claudine Valérie Rouamba/Ouédraogo, Professeur Titulaire, Université Joseph Ki-Zerbo (Présidente) ; Jean-François Silas Kobiané, Professeur Titulaire, Université Joseph Ki-Zerbo (Directeur de thèse) ; Marc Pilon, Directeur de recherche émérite, Université Paris Cité (Co-Directeur de thèse) ; Pam Zahonogo, Professeur Titulaire, Université Thomas Sankara (Rapporteur) ; Philippe Cordazzo, Professeur des universités, Université de Strasbourg (Rapporteur) ; Bilampoa Gnoumou/Thiombiano, Maître de conférences, Université Joseph Ki-Zerbo (Rapporteur) ; Richard Marcoux, Professeur Titulaire, Université Laval (Examinateur).
Du reste, les membres du jury ont tous apprécié la pertinence de la thématique et la qualité de la recherche et de ses résultats.
Par conséquent, après les délibérations, ils ont déclaré Sibi Guissou digne du grade de Docteur en démographie, avec la mention très honorable.
Jean-Yves Nébié
